• Borloo et Bachelot veulent-ils couvrir la France de matières radioactives ?

    Certains sèment la biodiversité, d’autres préfèrent semer la radioactivité. Les ministères de l’Ecologie, de la Santé et de l’Economie ont ouvert la porte au « recyclage » des déchets radioactifs issus de l’industrie nucléaire dans les biens de grande consommation. Du ciment radioactif pourra ainsi servir demain à bâtir des logements ou des écoles. Au grand dam des associations de consommateurs.

    Faudra-t-il bientôt se munir d’un compteur Geiger pour vérifier le taux de radioactivité que dégageront les murs de votre logement, vos équipements contenant du métal ou les matériaux présents sur votre lieu de travail ? Scénario de science-fiction ? Malheureusement non. Depuis 2002, le Code de la santé publique interdisait l’ajout ou l’utilisation de substances radioactives pour la fabrication de biens de consommation et de matériaux de construction.

    Toute acquisition et cession de sources radioactives étaient sévèrement encadrées. Ce n’est désormais plus le cas. Le 5 mai 2009, quatre ministères – celui de l’Ecologie, de la Santé, de l’Economie et du Logement – ont signé un arrêté interministériel qui permet de déroger à cette interdiction. Le texte est entré en vigueur malgré l’avis défavorable de l’Autorité de sûreté nucléaire.

    Cela signifie que demain, si EDF veut se débarrasser de ses gravats faiblement radioactifs générés par le démantèlement de la centrale de Brennilis, en Bretagne (la première centrale nucléaire française à être démantelée), elle aura la possibilité de les céder ou les vendre à une cimenterie. Celle-ci transformera les gravats en matériaux de construction, qui serviront ensuite à bâtir des bureaux, des logements, des écoles ou des hôpitaux...

    Idem pour Areva. Si la multinationale ne sait que faire de fûts en métaux contaminés suite à un transport d’uranium, elle pourra les livrer à une fonderie qui le recyclera dans des produits de grande consommation : outils, véhicules, machines agricoles ou tuyaux (ce qu’avait déjà tenté de faire Areva en 2004 [1]). Seuls cinq catégories de produits restent exclues de toute dérogation : les aliments, les cosmétiques, les parures (bijoux), les jouets et les matériaux en contact avec les aliments et les eaux (les emballages par exemple).

    Radioactivité lâchée dans la nature

    Seuls les déchets radioactifs dits de « très faible activité » (TFA) sont concernés. Il n’empêche. Jusqu’à présent, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) entrepose ces déchets dans un centre de stockage situé dans l’Aube (Champagne-Ardenne). Les déchets sont enterrés « à quelques mètres de profondeur dans une roche argileuse », puis le lieu de stockage est ensuite recouvert « d’une couche d’argile compactée pour lui redonner son imperméabilité d’origine ».

    En cas de recyclage, seuls les acteurs de la filière nucléaire sont habilités à réutiliser du béton ou les gravats contaminés pour leurs installations. Ces précautions disparaissent avec le système de dérogation. Une fois lâchés dans la nature, ces matériaux ne seront plus tracés ni contrôlés.

    « Même si ces déchets TFA seront dilués dans d’autres matériaux, cela va augmenter le bruit de fond de la radioactivité. Faible niveau de risque ne signifie pas absence de risque », explique Corinne Castanier, directrice de la Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (Criirad). Contrôler les rayonnements radioactifs coûte très cher. Les entreprises qui recycleront ces matériaux auront donc tendance à ne procéder qu’à des vérifications partielles sur des échantillons de ciment ou de ferraille « dilués ». Ce qui augmentera la possibilité de laisser passer un parpaing ou une tôle trop radioactive.

    Multiplicateurs de cancers

    Corinne Castanier ne comprend pas pourquoi le gouvernement a pris une décision si lourde de conséquences pour la santé, à l’heure où les pouvoirs publics cherchent, dans le cadre du « plan cancer », à diminuer l’exposition des populations à la radioactivité naturelle (notamment le radon, qui favorise les cancers pulmonaires selon l’Organisation mondiale de la santé).

    En rendant possible l’ajout de substances radioactives dans des biens et des matériaux destinés au grand public, le système de dérogation risque bien d’augmenter la radioactivité artificielle, et les risques de cancer. « Seuls les industriels y trouvent un intérêt. Au lieu de stocker ces déchets, ce qui coûte cher, ils pourront s’en débarrasser tout en récupérant de l’argent. » Avec le démantèlement progressif des centrales nucléaires vieillissantes, le volume des déchets radioactifs sera multiplié par trois d’ici 2020, selon les prévisions de l’Andra.

    Ce retour en arrière est d’autant plus incompréhensible que l’on cherche à réparer les erreurs commises depuis un demi-siècle. Jusqu’en 1986, 50 000 paratonnerres radioactifs [2] ont été disséminés dans toute la France, plus sept millions de détecteurs de fumée contenant de l’américium 241 [3], radioactif pendant 433 ans ! « Nous sommes en train de courir pour retrouver les objets radioactifs disséminés sur tout le territoire et le gouvernement rouvre la porte à des dérogations. Il faut tirer les leçons de ces années-là ! », assène la directrice de la Criirad.

    L’interdiction, en 2002, d’ajouter ou d’utiliser des substances radioactives dans des matériaux ou des biens de grande consommation avait été obtenue après un long travail de la Criirad et des associations de consommateurs, comme l’UFC Que choisir.

    Avant cette réglementation, presque tout était permis. Ainsi Saint-Gobain avait introduit des déchets radioactifs dans la fabrication de sa laine de verre (Isover) multipliant par vingt les rayonnements. Ou la Cogema (devenue Areva) qui avait ajouté de l’uranium appauvri dans la poudre d’émail jaune destinée à la fabrication de bijoux. « Si demain la législation autorise l’addition de substances radioactives, il s’agira de modes de fabrication standard. Ce ne sont plus seulement la laine de verre et les émaux qui seront radioactifs, mais le ciment, le béton, l’acier, les pièces métalliques, le carrelage, les appareils ménagers, les ustensiles quotidiens... On peut légitimement s’inquiéter car le risque est bien réel. Le démantèlement des installations nucléaires va générer 15 millions de tonnes de déchets », s’inquiétait alors l’UFC Que choisir. Tout est désormais à refaire.

    Recours juridique et responsabilité politique

    La Criirad a d’abord adressé un recours au Conseil d’Etat pour faire annuler l’arrêté sur la base de ses « anomalies juridiques ». En cause : les modalités d’information des consommateurs. Celles-ci restent à la discrétion des industriels qui se garderont bien de mettre le logo spécifique aux matériaux radioactifs sur les emballages ! On ne peut faire plus laxiste. Or, c’est aux ministères concernés de définir ces modalités d’information. Ensuite, une telle décision concernant le Code de la santé publique ne peut être prise que par décret, signé directement par les ministres. Mais seuls les chefs de service des administrations concernées ont apposé leur signature au bas de l’arrêté.

    L’association a adressé à Jean-Louis Borloo, Roselyne Bachelot et Christine Lagarde une lettre ouverte le 6 novembre 2009 pour les alerter « sur le contenu et les conséquences d’un texte, pris en leur nom » et pour qu’ils l’annulent. Plus de 7 000 cartes pétitions ont également été envoyées par des citoyens. Après deux mois de silence gouvernemental, Corinne Castanier sera reçue le 11 janvier au ministère de l’Ecologie. « Ils ne pourront pas dire qu’ils ne sont pas au courant ». Si rien ne bouge, la campagne pour l’annulation de l’arrêté se durcira, avec l’entrée en lice des associations de consommateurs.

    source: Sortir du Nucléaire


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  • Après "Mourir sur le Dakar" (voir mon billet du 3/01), la suite de cette merveilleuse épreuve (dépêche Associated Press):

    "Le motard italien Luca Manca, victime d'une grave chute jeudi lors de la sixième étape dans le nord du Chili, se trouve toujours dans un état critique, selon des sources hospitalières.

    Luca Manca a été transféré dans un hôpital de Santiago après avoir été dans un premier temps évacué sur l'hôpital Del Cobre de Calama à la suite de son accident jeudi au cours de l'étape disputée entre Antofagasta et Iquique. L'Italien, grièvement blessé à la tête, avait été plongé dans un coma artificiel. Des responsables médicaux avaient alors souligné que son pronostic vital était engagé.

    Vendredi, le Dr Alberto Munoz, chef de l'unité des soins intensifs de l'hôpital Mutual de Seguirdad, a annoncé que son état s'était légèrement amélioré mais qu'il resterait dans un coma artificiel pendant au moins cinq jours.

    Ajoutant que le motard de 29 ans avait été placé sous assistance respiratoire, mais n'avait pas été en mesure de réagir aux stimulations extérieures après le drame de jeudi, il a précisé qu'il était impossible de connaître les dommages neurologiques que l'accident pourrait avoir causés.

    Le rallye Dakar, considéré comme l'une des épreuves les plus dangereuses des sports motorisés, doit s'achever le 16 janvier à Buenos Aires. Samedi, une spectatrice de 28 ans était morte après avoir été percutée par un véhicule victime d'une sortie de route lors de l'étape inaugurale.

    Le Français Pascal Terry avait perdu la vie l'an dernier au cours du rallye."


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  • "Le statut de la science dans notre société est devenu foncièrement ambivalent.

    D'un point de vue idéal, la science demeure le socle officiel de nos sociétés, qui est censé avoir remplacé l'ancien socle qui était religieux. Tous les jours nous sommes soumis à des jugements, qui ne sont pas prononcés par des idéologues illuminés ou pas des prêtres fanatiques, mais par des experts qui se réfèrent donc à une objetcivité de type scientifique (...) Nous considérons qu'une société n'est vraiment moderne que lorsque le prêtre et l'idéologue ont été remplacé par des experts qui aident à prendre les bonnes décisions. ça c'est l'aspect idéal, et je pense qu'il continue symboliquement à fonctionner. Nous ne sommes pas gouvernés par la science, mais nous sommes gouvernés au nom de quelque chose qui a à voir avec la science.

    Dans sa réalité pratique, et c'est tout ce qui fait cette ambivalence, la science est contestée comme jamais, voire marginalisée.Elle est l'objet d'une désaffection et d'une méconnaissance. Nous disons que nous appartenons à une société de la connaissance, c'est faux: nous sommes dans une société qui est à l'aise avec les nouvelles technologies."

    Etienne Klein, physicien, France Culture, 31/12/09


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  • Natalia Gallardo était une jeune femme de 28 ans venue assister à la première étape du "Dakar", aujourd'hui 2 janvier 2010, en Argentine. Natalia est morte, après avoir été percutée par une voiture qui a fait une sortie de route.

    Quatre autres personnes ont elles aussi été percutées par cette voiture, et l'une d'entre elle, un homme de 24 ans, est dans un état grave.

    Quand cessera donc cette folie ? Cette course est une ignominie, à tel point que le départ n'est plus donné depuis longtemps depuis l'Europe par peur des manifestations bloquant la course. Il a été décidé d'externaliser l'horreur vers un pays émergent (l'Argentine) de même que nous délocalisons les usines polluantes qui fabriquent la plupart des produits que nous consommons (vers la Chine, l'Inde).

    Cette course tue chaque année des spectateurs et des participants.

    Elle émet une quantité colossale de gaz à effets de serre, et répand l'idée qu'on s'éclate trop quand on roule en 4x4 (dans tous les sens du terme).

    Elle est l'une des pires expressions de l'individualisme et du machisme.

    Elle ignore les spécifités des pays et des cultures qu'elle traverse.

    Elle impose une logique publicitaire décervelante.

    Elle brasse des millions d'euros, alors qu'elle se déroule dans des pays où le taux de pauvreté est bien plus élevé que dans le pays dit "développé" (la France donc) à l'origine de cette verrue immonde qu'est le Dakar.

    Elle spolie le nom d'une capitale africaine, sans rien demander aux habitants de celle-ci.

    Natalia Gallardo est la victime de cette machine à tuer, machine qui tuera encore si personne ne l'arrête. Peuple Argentin, en mémoire de Natalia, et pour ta propre sécurité, n'assiste surtout pas au passage de cette lugubre caravane d'acier!

    Heureusement France Info est là pour nous expliquer que cet accident est dû à l'"enthousiasme" des spectateurs, mais ne remet évidemment pas en cause le principe de cette course d'un autre âge, celui de l'automobile reine.


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  • Ce gouvernement schizophrène ne cesse de vanter sa politique dite "verte" et en même temps instaure une prime à la casse pour les voitures. Du coup, les ventes de voitures neuves ont connu une année record. Tout le monde s'en félicite!

    On oublie que de nombreux modèles ne sont pas fabriqués en France, rendant le coup de pouce à l'industrie automobile pas si efficace qu'il y paraît.

    On oublie aussi que les voitures sont parmi les principaux émetteurs de CO2, de pollution sonore, et symbolisent à merveille notre société hyper-individualiste...


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  • «Le plus important dans la Terre promise, ce n'est pas la terre, c'est la promesse». Jean-Michel Guenassia, Le Club des incorrigibles optimistes


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  • Réseau "Sortir du nucléaire" - Fédération de 850 associations
    Communiqué du 27 décembre 2009 - Contact : 06.64.100.333
      
    Nucléaire - Appel d'offre à Abou Dhabi :
    "Sortir du nucléaire" se félicite
    de l'échec de l'offre française
     
    - La vente d'un réacteur EPR à la Finlande coûte des milliards à la France
    - Il est donc heureux que l'EPR ne soit pas sélectionné à Abou Dhabi
    - Les projets nucléaires d'Abou Dhabi restent néanmoins virtuels 
      
    Le Réseau "Sortir du nucléaire" se félicite de ce que l'offre française, portée par EDF, Areva, Suez-GDF et Total, n'ait pas été retenue par l'Emirat d'Abou Dhabi, qui a la mauvaise idée de projeter la construction de plusieurs réacteurs nucléaires.

    C'est en effet une bonne chose pour la France que le réacteur français EPR ait été recalé car, comme le montre le cas de la Finlande, la vente d'un EPR coûte de l'argent à la France au lieu de lui en rapporter.
    Vendu 3 milliards d'euros à la Finlande, l'EPR, dont le chantier (commencé fin 2005 et qui compte au moins 3 ans de retard) est un désastre industriel et financier, va en réalité coûter au moins 6 milliards et c'est la France qui va devoir payer cet immense surcoût. 
     
    D'ailleurs, le chantier du second EPR, actuellement en cours à Flamanville (Manche), suit le même chemin : commencé fin 2007, il compte déjà un an de retard et un milliard de surcoût. Il n'y a donc objectivement aucune raison pour l'éventuelle vente d'autres réacteurs EPR ne se solde pas à nouveau par des surcoûts à la charge de la France.

    Archaïque avant même d'entrer en service (il a été conçu au début des annés 90 !), le réacteur EPR est si cher et si mauvais qu'il n'a quasiment aucune chance d'être retenu par des électriciens étrangers. Et ce d'autant que l'autorité de sûreté britannique (par la suite rejointe par les autorités de sûreté finlandaise et française, qui n'avaient elles rien détecté !) a récemment mis à jour une grave faille dans le système de sûreté de l'EPR.
     
    Tous les réacteurs nucléaires sont dangereux et chers, mais l'EPR est assurément un des pires réacteurs nucléaires de tous les temps.

    Ceci dit, comme c'est déjà le cas de la plupart des projets de nouveaux réacteurs annoncés ici ou là (*) sur Terre, le projet nucléaire d'Abou Dhabi a de bonnes chances d'être abandonné : utiliser des réacteurs nucléaires n'est pas seulement la façon la plus dangereuse et la plus polluante de produire de l'électricité, c'est aussi la plus chère.

    La majorité des pays a compris que la seule bonne option était de développer simultanément les économies d'énergie et les énergies renouvelables, et de ne surtout pas investir dans une technologie archaïque comme le nucléaire.. Une fois de plus, la France atomique va dans le mur…
     

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  • "On n'a jamais vu un aveugle dans un camp naturiste." Woody Allen


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  • Je relaie un message du réseau Sortir du Nucléaire, auquel je vous conseille vivement de vous abonner.

    Bruno Chareyron, ingénieur en physique nucléaire, chef du laboratoire de la Criirad, Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité, dénonce les mensonges de l’industrie nucléaire qui minore ses émissions de CO2 et ses déchets.

     Que répondez-vous à Anne Lauvergeon, présidente  d'Areva, lorsqu'elle affirme que l’énergie nucléaire est « propre » ?
    Anne Lauvergeon dit que le nucléaire ne fait pas de CO2. C’est une affirmation totalement erronée.
     
    C’est pourtant une information reprise régulièrement dans la presse notamment…
    Cela fait partie des informations fausses que l’industrie nucléaire véhicule depuis maintenant très longtemps. Avec deux grands mensonges : faire croire aux gens que l’énergie nucléaire ne fait pas de CO2 et qu’elle ne fait que très peu de déchets radioactifs, et qu’on sait parfaitement les gérer. Lorsque l’industrie nucléaire affirme que cette énergie ne fait pas de CO2, c’est faux parce qu’à chacune des étapes de la production et de l’utilisation de l’énergie nucléaire, il y a des rejets de CO2.
     
    Quelle est la nature de ces émissions de CO2 et dans quel volume ?
    L’extraction par exemple de l’uranium par des filiales d’Areva au Niger nécessite de l’énergie. Les pelles, les camions et les machines utilisés pour l’extraction fonctionnent au fioul et grâce à une centrale thermique au charbon extrêmement polluante. Lorsqu’on évoque l’énergie nucléaire, il faut l’analyser du début, sur la mine d’uranium à la fin, c’est-à-dire le retraitement, pour ce qui concerne la France. Ce qui est frappant, c’est qu’à chaque étape, il y a des rejets de CO2. Tout l’uranium brûlé dans les centrales françaises passe par la Comurhex de Malvesi, près de Narbonne, qui purifie l’uranium naturel pour en faire de l’UF4. Cette usine a rejeté en 2007, selon les propres chiffres d’Areva, 384 500 tonnes d’équivalent CO2 et d’oxydes nitriques, ce n’est pas rien.
     
    Est-ce que les rejets de l’industrie nucléaire sont chiffrés et transparents ?
    Posez la question à Areva. Il existe de nombreuses études qui démontrent qu’à force d’aller chercher un minerai de plus en plus pauvre en uranium, il faut de plus en plus d’énergie pour accéder à ce minerai. Le bilan énergétique et le bilan carbone de cette filière nucléaire est, et sera à l’avenir de plus en plus dégradé. Il serait très intéressant qu’Areva publie un bilan carbone de l’ensemble du cycle du combustible nucléaire. Il faut savoir que même l’usine de retraitement de La Hague, est une des industries qui rejettent le plus de gaz à effet de serre de la région nord-Cotentin, 80 000 tonnes de CO2 en 2007.
     
    Qu’en est-il des centrales nucléaires elles-mêmes ?
    Pour fabriquer une centrale nucléaire, il faut énormément de béton, ce qui produit évidemment des gaz à effet de serre. Une centrale nucléaire réchauffe directement l’environnement, puisque le rendement d’une centrale est d’environ 30%. Les 2/3 de l’énergie qui sort du combustible sont perdus localement sous forme d’échauffement de l’eau et de l’air. Par ailleurs, il y a une question qui n’est jamais traitée, sans que je sache pourquoi, c’est la question de la vapeur d’eau, qui est un gaz à effet de serre. Si on veut être scientifiquement juste, lorsqu’on parle du nucléaire, il faut que la filière nucléaire sorte un bilan carbone honnête et scientifique sur toutes ces étapes.
     
    S’agissant des déchets, vous êtes également en désaccord avec les affirmations de la patronne d’Areva ?
    Selon Anne Lauvergeon, le nucléaire ne produit que de toutes petites quantités de déchets. Il faut quand même rappeler que la mine d’uranium représente une première étape particulièrement polluante dans la production nucléaire. Cette extraction produit des quantités énormes de déchets radioactifs. On dénombre en France plus de 50 millions de tonnes de boues radioactives, résidus de l’extraction de l’uranium. On estime qu’il y en aurait plus de 35 millions de tonnes au Niger et 7,5 millions au Gabon. On ne peut pas appeler ça des petites quantités de déchets.
     
    Comment se situe la Criirad par rapport à des organisations militantes comme Sortir du nucléaire ?
    L’objectif de la Criirad, c’est que l’opinion publique ait accès à l’information la plus fiable possible sur la radioactivité en général. La Criirad est une commission de recherche qui se base sur des données scientifiques, sans se positionner pour ou contre le nucléaire. Notre rôle est d’apporter une expertise sur l’impact de la radioactivité, et de fournir aux citoyens comme aux décideurs politiques une information la pus honnête possible. Tout est parti du mensonge de Tchernobyl, au lendemain duquel un groupe de citoyens a estimé nécessaire de disposer de moyens de mesures et d’expertises indépendants.
     
    Comprenez-vous la politique nucléaire française réaffirmée récemment par Nicolas Sarkozy ?
    Il ne faut pas laisser croire que l’énergie nucléaire est propre. Après, que les gens décident en toute connaissance de cause, en considérant les avantages et les inconvénients de chaque source d’énergie, qui ont toutes leurs aspects négatifs, c’est leur responsabilité.
     
    Les politiques disposent-ils d’une information transparente dans ce domaine ?
    On voit bien l’étonnement de certains politiques comme Jean-Louis Borloo après la diffusion d’une émission d’Elise Lucet sur la France contaminée, dans Pièces à conviction. Pourtant, l’impact des anciennes mines d’uranium en France, révélé sur France 3, est un problème que nous dénonçons depuis 16 ans.

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