• seuil critique

    A-t-on atteint le seuil critique ?

    Une équipe d’éminents chercheurs s’est réunie pour déterminer jusqu’à quel point l’humanité avaient malmené l’écosystème planétaire. Parmi eux, Johan Rockström, le directeur de l’Institut de l’environnement de Stockholm, le lauréat du prix Nobel de chimie Paul Crutzen et James Hansen, le directeur de l’Institut Goddard d’études spatiales de la NASA. Voici leurs conclusions.

    • AÉROSOLS ATMOSPHÉRIQUES
    LIMITE Pas encore établie
    DIAGNOSTIC Inconnu

    L’activité humaine produit de la poussière, de la suie, des sulfates et d’autres particules. La concentration de ces aérosols atmosphériques a plus que doublé depuis la révolution industrielle. Certains aérosols, comme les sulfates, réfléchissent le rayonnement solaire, ce qui entraîne un refroidissement. D’autres, comme la suie, l’absorbent et le rediffusent, provoquant un réchauffement. La conjugaison de ces deux phénomènes à l’échelle de la planète a un effet qui n’est pas clairement établi. De plus, les aérosols ont d’autres effets sur le climat. Par exemple, le brouillard de pollution qui recouvre de façon quasi permanente l’Asie du Sud et de l’Est semble influer sur la période et la localisation de la mousson. Bien que les préjudices causés par les aérosols soient importants, leurs effets sont si variables que l’équipe de Johan Rockström n’a pas encore pu fixer de limites de sécurité.


    • OCÉANS ACIDES
    LIMITE La moyenne mondiale du taux de saturation en aragonite ne doit pas être inférieure à 2,75
    NIVEAU ACTUEL 2,90
    DIAGNOSTIC Certains océans franchiront le seuil critique vers le milieu du siècle

    Plus l’atmosphère est riche en CO2, plus les océans en absorbent, ce qui entraîne la formation d’acide carbonique. Depuis la révolution industrielle, le pH des eaux superficielles des océans est tombé de 8,16 à 8,05 [plus le pH est faible, plus le milieu est acide]. Cette acidification provoque une diminution de la concentration en carbonate de calcium dissous dans les eaux superficielles, dont l’aragonite – la forme utilisée par de nombreux organismes, y compris les coraux, pour fabriquer leur coquille. Un point critique sera atteint si la teneur des eaux en aragonite devient trop faible. Certains secteurs des océans Arctique et Austral pourraient passer au-dessous du seuil critique de 1 vers 2050. Certaines espèces seraient alors rongées par l’eau acide. Plus dépeuplés, les océans risqueraient de moins absorber le CO2, ce qui accélérerait le réchauffement mondial. Johan Rock­ström propose de maintenir la moyenne mondiale du taux de saturation en aragonite au-dessus de 2,75. Cela suppose que la concentration de CO2 dans l’atmosphère reste inférieure à 430 parties par million, soit un niveau plus faible que celui de 450 ppm, considéré par les scientifiques comme la limite pour le réchauffement mondial.


    • GAZ A EFFET DE SERRE
    LIMITE La concentration de CO2 dans l’atmosphère ne doit pas dépasser 350 parties par million (ppm)
    NIVEAU ACTUEL 387 ppm
    DIAGNOSTIC La limite est déjà franchie

    C’est le plus grave problème. Toutes les données recueillies jusqu’ici montrent que l’augmentation de la concentration atmosphérique en CO2 entraîne un réchauffement de la planète. L’équipe de Johan Rockström, conseillée par James Hansen, estime que le seuil critique a été dépassé depuis plus de vingt ans, quand nous avons franchi le niveau de 350 ppm. Chaque degré de réchauffement dû au CO2 est amplifié par des réactions en chaîne. Les glaces fondent, accroissant la surface sombre des océans, la planète absorbe alors plus de chaleur solaire. L’évaporation augmente, et avec elle la concentration en vapeur d’eau – un autre gaz à effet de serre – dans l’atmosphère. Une hausse de température de 1 °C due au CO2 produirait un réchauffement d’environ 3 °C. La situation pourrait même être plus grave encore. Selon certains climatologues, dont James Hansen, le réchauffement pourrait provoquer le dégazage des réserves naturelles de CO2 et de méthane – un autre gaz à effet de serre –, auquel cas une hausse de 1 °C due au CO2 aboutirait à un réchauffement global de 6 °C.


    • COUCHE D’OZONE
    LIMITE  La concentration moyenne d’ozone stratosphérique ne doit pas descendre au-dessous de 276 unités Dobson
    NIVEAU ACTUEL 283 unités Dobson
    DIAGNOSTIC Pas de danger immédiat, tendance à l’amélioration

    Le trou de la couche d’ozone qui s’est formé dans la stratosphère au-dessus de l’Antarctique dans les années 1970 est un exemple classique de seuil critique. Les substances chimiques destructrices d’ozone produites par l’activité humaine, tels que les chlorofluorocarbures (CFC), se sont accumulées dans la stratosphère polaire jusqu’à ce que, brusquement, la couche d’ozone située au-dessus de la région change radicalement d’état. Depuis que les principales substances responsables du trou de la couche d’ozone sont interdites, le pire semble passé. Mais le réchauffement planétaire pourrait changer cela. Comme la surface de la Terre piège une plus grande quantité de chaleur, la stratosphère a tendance à refroidir. Elle pourrait devenir si froide au niveau du pôle Sud que les substances destructrices d’ozone présentes dans l’atmosphère pourraient créer un trou au-dessus des continents situés plus au nord.

    New Scientist, dans Courrier International 


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